mardi 6 mars 2012

Un matsuri tout feu tout flamme

Le 11 février (mieux vaut tard que jamais), je me suis rendue en solitaire au 39ème festival du temple Agon Shu. Pourquoi en solitaire? Je n'étais pas vraiment d'humeur à parler à un autre être humain, et en plus, mes amis avaient pour la plupart fait la fête toute la nuit au karaoke et je ne doutais pas qu'il leur faudrait deux jours pour récupérer.

Ainsi, je suis tranquillement montée dans le shuttle bus qui partait de la gare afin de me rendre dans ce temple assez unique, puisqu'il célèbre à la fois les traditions bouddhiques et shintoïstes (assez courant au Japon finalement, ce qu'on imaginerait pas voir en Europe: un peu comme si on décidait de créer un mosquée-église), situé dans les montagnes kyotoïtes à l'est. De fait, pour y accéder, le bus a traversé quelques tunnels.
J'arrive sur place ou je suis accueilli par deux brasiers gigantesques dont on sent la chaleur même à une bonne centaine de mètres. Ce matsuri est dédié à ces rites du feu afin de célébrer le don d'une relique de Buddha, le shinsei-busshari, offerte au temple en 1986 par le gouvernement sri lankais.  Un matsuri très jeune, donc, mais suivi par des centaines de personnes, à en juger la foule s'étant déplacée au temple. On y a mêlé des rites shintoïstes en 1993 suite à la participation du temple à la reconstruction du sanctuaire shintô d'Ise (le lieu le plus spirituel du Japon).

Le deux bûchers, nommés goma-dan sont dédiés, pour le premier, aux prières, voeux et souhaits des vivants, c'est le Kongo kai, quand le deuxième est dédié à l'âme des morts, c'est le Taizo kai. Les fidèles écrivent sur des Gomagi (bâton de prière) leur voeu ou le nom d'une personne décédée, avant de les délivrer aux prêtres qui se chargeront ensuite de les jeter dans les flammes tout en priant pour la personne décédée ou la réussite des vivants.

C'était assez hallucinant de voir les moines prier en joignant les mains à chaque gomaki lancé dans les flammes (sachant que des gomaki, il y en avait des milliers).




Déjà que moi, j'avais chaud depuis les tribunes, je n'imagine pas la fournaise que cela devait être en bas pour ses pauvres lanceurs d'eau. Et oui, des lanceurs d'eau se relayaient car l'inconvénient des bûchers, c'est que leur enceinte est en bois et risquait donc de brûler elle aussi... pas très malin si vous voulez mon avis.

Un petit aperçu des piles de centaines de gomaki attendant d'être brûlés.




Le tout en musique avec chants, conques et tambours japonais. Bien plus entraînant que les chants grégoriens.


De jeunes volontaires.

L'orchestre.


Les souffleurs de conque.

Je dois dire que si je craignais un peu d'y aller toute seule et de m'ennuyer, cet après-midi a été tout le contraire: je ne sais pas si quelqu'un m'avait collé une pancarte dans le dos "ATTENTION ETRANGERE PAUMEE" mais j'ai été successivement prise sous l'aile de trois dames japonaises.

La première, près des bûcher, a engagé la conversation, m'a guidé à la tente des sceaux mis à disposition des visiteurs pour un tampon souvenir sur son prospectus, puis m'a raconté sa vie avant de me filer son numéro de téléphone et son adresse email au cas ou j'irais visiter Kobe (sans doute la semaine prochaine d'ailleurs !), son lieu d'habitation. Le tout en japonais -là, je m'aime.

La seconde m'a limite pris par la main dans un élan maternelle tout à fait compréhensible -c'est vrai quoi, je prenais des photos tout en ayant sans doute l'air très apeuré par toute cette gigantesque agitation, et puis, à me regarder,on croirait facilement que je sors de l'école primaire, M'ENFIN PASSONS. Cette dame très sympathique au final a insisté afin de me prendre en photo devant tout ce qui bougeait, y compris en compagnie de ses collègues volontaires pour une petite photo de groupe.
Je crois que le grand-père à droite sur la photo ne comprenait pas plus que moi ce qui lui arrivait.

Comme ceci était un matsuri, il y avait forcément un groupe d'enfants chantant et dansant devant le bâtiment principal.




J'ai même eu droit à un démonstration de Gagaku, musique impériale traditionnelle, où j'ai rencontré la troisième dame japonaise se tapant l'incruste dans mon après-midi pas si solitaire que ça. Assise à côté de moi, nous avons discuté de mon voyage au Japon, de mon université, de la France, de sa ville natale et de la ville touristique qu'elle avait visité la veille. J'ai même eu droit à une tasse de thé après le spectacle et à un carnet de coupons de réduction pour la ville touristique où elle était allée. Bref, que du bonheur (ceci n'est pas ironique).





BOUH

Au final cette sortie inattendue a bien enjolivé mon week end et s'impose tout simplement comme mon meilleur matsuri depuis septembre dernier...

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